La sanction tombe, sans détour : une entreprise comptant plus de dix salariés qui néglige l’accessibilité de ses services numériques s’expose à une amende. Aucun besoin qu’un client lésé se manifeste, la loi se montre proactive. Depuis la directive européenne 2019/882, de nouvelles règles s’imposent à tous les produits et services digitaux, et les acteurs privés n’y échappent pas. Dès 2025, la législation européenne dicte une marche à suivre technique précise, partout sur le continent.
Les microentreprises bénéficient parfois d’un traitement particulier, mais le statut reste strict : la plupart des PME doivent appliquer les nouvelles normes. Selon le pays, les sanctions diffèrent, mais le ton est donné : chaque État membre doit transposer la directive, orchestrer les contrôles et garantir le respect de la loi. À la clé, des pénalités qui vont bien au-delà du simple rappel à l’ordre.
Comprendre la législation européenne sur l’accessibilité : origines et enjeux
La norme européenne accessibilité n’est pas apparue du jour au lendemain. Son origine s’enracine dans la convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées, ratifiée par l’Union européenne dès 2010. La ligne de mire : permettre à chacun, sans laisser quiconque au bord de la route, d’accéder aussi bien aux produits et services matériels qu’aux environnements numériques.
Le véritable tournant se produit avec le parlement européen qui décide, face à la montée en puissance du digital, d’infléchir durablement les règles du jeu. Promulguée en 2019, la directive européenne 2019/882, aussi appelée European Accessibility Act, impose aux États membres d’intégrer dans leur législation des exigences claires en matière d’accessibilité. Ce texte vise large : terminaux bancaires, livres électroniques, applis mobiles, automates, tout y passe.
L’acte législatif ne se contente pas de fixer des standards techniques. Il cherche à établir un terrain de jeu équitable, un marché unique de l’accessibilité, pour que chaque entreprise réponde à la même règle et que les barrières réglementaires s’aplanissent. Ce choix s’enracine dans une réalité dure : près de 87 millions d’Européens déclarent vivre avec un handicap ou des limitations fonctionnelles, assez pour briser l’illusion d’une norme nationale suffisante.
La portée de la loi ne se cantonne plus à la sphère publique. Elle frappe aussi dans le privé, parfois là où personne ne l’attendait. Toute société qui propose des services numériques à grande échelle doit désormais justifier sa capacité à servir sans barrières. Le ton est donné : s’adapter cesse d’être un vœu pieux ou une posture de communication, c’est une obligation pour éviter des sanctions bien concrètes.
À qui s’adresse l’European Accessibility Act et quels secteurs sont concernés ?
Le champ d’application englobe un vaste panel d’organismes. Dès qu’une entreprise privée met sur le marché des produits ou services numériques destinés au grand public, elle se retrouve concernée. Les organismes publics et les structures qui assurent des services essentiels sont eux aussi dans les filets du texte, aboutissant à une généralisation de l’accessibilité dans tout l’espace européen.
Contrairement à une croyance répandue, il ne s’agit pas seulement de sites web ou d’applications mobiles. Pour mieux distinguer les principaux domaines touchés, résumons-les :
- les services bancaires (guichets automatiques, terminaux de paiement, etc.)
- les livres électroniques et les logiciels associés à leur lecture
- l’ensemble des services de communications électroniques
- les services de commerce en ligne et plateformes de réservation
Les produits TIC, autrement dit toutes les technologies de l’information et de la communication, doivent respecter ce cadre : l’accessibilité ne se négocie plus selon la taille ou l’usage. Cela dit, les états membres gardent le droit d’ajuster certains points de l’accessibility act EAA en fonction du contexte local, notamment pour les entités les plus modestes.
L’accessibilité des produits et services n’est plus une formalité, mais un levier pour atteindre un public élargi. Elle concerne désormais la quasi-totalité des services numériques, sites internet et applications qui rythment à la fois notre vie privée et professionnelle.
Exigences clés et obligations pour la mise en conformité
Pour se conformer à l’acte européen accessibilité, les entreprises doivent suivre un corpus d’exigences détaillé. Toute entité soumise à la directive accessibilité a l’obligation de rendre ses produits et services numériques véritablement accessibles, y compris selon les besoins de personnes en situation de handicap. Cela vise autant les plateformes en ligne que les applis mobiles, mais aussi les appareils de paiement ou les bornes interactives.
Les attentes s’articulent autour de trois axes : permettre de percevoir l’information (via la compatibilité avec synthèse vocale ou braille, navigation au clavier, etc.), rendre les interfaces compréhensibles (textes et éléments clairs, logiques), offrir une fonctionnalité totale (possibilité de procéder à un achat en ligne ou de signer un document, quelle que soit la situation).
Pour mesurer leur conformité, les entreprises s’appuient généralement sur des référentiels éprouvés, tels les WCAG à l’international ou le RGAA en France. Le contrôle passe par des audits réguliers, la publication d’une déclaration d’accessibilité et la mise à disposition d’un canal de signalement des difficultés. Négliger ces obligations expose directement aux sanctions qui peuvent être infligées par les autorités compétentes, comme l’Arcom en France, entre autres exemples européens.
Des exceptions sont parfois admises pour certaines microentreprises ou lorsqu’une contrainte technique insurmontable est identifiée. Mais le cap est clair : faire de l’accessibilité le standard, en demandant à chaque acteur d’opérer un véritable virage dans sa façon de créer et de diffuser des services.
Ressources pratiques et solutions pour accompagner la transition vers l’accessibilité
Mettre en place l’accessibilité numérique dans une organisation ne laisse plus de place à l’improvisation. Pour s’équiper, il existe une multitude de solutions adaptées à chaque besoin. Les équipes web ont désormais à leur portée des outils de test d’accessibilité capables de débusquer rapidement des erreurs sur leurs plateformes. Parmi eux : Axe DevTools, Wave ou Tanaguru, tous conçus pour détecter aussi bien un contraste défaillant qu’une image sans texte alternatif.
L’apprentissage prend aussi tout son sens : intégrer la conception universelle dès l’origine du projet, de la maquette à l’intégration finale, s’impose peu à peu comme la meilleure garantie de réussite. Plusieurs organismes proposent des formations pratiques, à distance ou en présentiel, pour sensibiliser à chaque étape. Dans le secteur public, certains guides offrent des exemples concrets, des retours sur expérience et des modèles de déclaration pour cadrer ce passage souvent complexe.
Panorama des ressources-clés
Pour structurer une démarche accessible, différents outils et référentiels méritent d’être retenus :
- Le référentiel RGAA, base incontournable pour évaluer la conformité des sites et services numériques sur le territoire français
- Des guides pédagogiques s’appuyant sur les critères WCAG, utilisés par la majorité des développeurs en Europe
- Des extensions de navigateur comme Accessibility Insights ou Lighthouse, automatisant les premiers contrôles
Impliquer des personnes qui utilisent des technologies d’assistance lors des tests permet d’identifier des freins réels et d’ajuster les solutions en continu. Croiser différents profils de testeurs offre une vision bien plus proche de la réalité que de simples critères techniques appliqués à la lettre.
Réussir ce virage demande de s’informer constamment, de rester attentif aux évolutions normatives, d’intégrer les avancées du secteur et d’être réceptif aux besoins exprimés par ceux qui vivent l’accessibilité au quotidien. L’accessibilité numérique avance, qu’on décide de la prendre en route ou non. La question n’est plus de savoir si la mutation s’opérera, mais qui saura la transformer en atout et refuser d’être laissé en marge du progrès.